Jean-Lucien Savi de Tové, 85 ans, une des figures historiques de l’opposition togolaise, a été élu président de la République ce samedi 3 mai 2025. Seul candidat, il occupera une fonction désormais honorifique dans le nouveau régime parlementaire.
Au Togo, Jean-Lucien Savi de Tové a été élu ce samedi 3 mai 2025, président de la République à l’unanimité des voix des 150 votants, un poste désormais honorifique dans le cadre du nouveau régime parlementaire instauré par la Constitution promulguée en mai 2024. L’annonce a été faite au cours d’une séance conjointe de l’Assemblée nationale et du Sénat réunis en Congrès, quelques heures après la désignation de Faure Gnassingbé comme Président du Conseil, véritable chef de l’exécutif dans le nouvel ordre institutionnel. Proposé par le parti au pouvoir Union pour la République (Unir), Jean-Lucien Savi de Tové était le seul candidat en lice.
Figure historique de la scène politique togolaise, Jean-Lucien Savi de Tové est un ancien ministre et opposant de longue date au régime de feu Eyadéma. Diplômé en droit de l’université de Bordeaux, il a notamment occupé dans les années 1960 le poste de Secrétaire général au ministère des Affaires étrangères, avant d’être emprisonné en 1979 pour tentative de coup d’État, aux côtés d’autres figures de l’opposition comme Gilchrist Olympio.
À la faveur du retour au multipartisme dans les années 1990, Savi de Tové fonde le Parti des démocrates pour l’unité (PDU), et joue un rôle actif dans la vie politique nationale, notamment comme Vice-président de la Convergence patriotique panafricaine (CPP) d’Edem Kodjo. Il a été nommé ministre du Commerce, de l’Industrie et de l’Artisanat de 2005 à 2007, dans les tout premiers gouvernements formés par Faure Gnassingbé à son arrivée au pouvoir. À ce poste, il participe également aux processus de dialogue politique intertogolais.
Lorsque Faure Gnassingbé accède au pouvoir en 2005, Jean-Lucien Savi de Tové est nommé ministre du Commerce, de l’Industrie et de l’Artisanat, fonction qu’il occupe jusqu’en 2007 au sein du tout premier gouvernement de la nouvelle présidence. Deux ans après son départ du gouvernement, en 2009, il est nommé président du Cadre Permanent de Dialogue et de Concertation (CPDC), une instance politique créée par décret présidentiel, chargée de favoriser un dialogue constant entre les acteurs politiques togolais, dans le but de consolider les institutions républicaines et de promouvoir la stabilité nationale.
Originaire du sud du pays, Jean-Lucien Savi de Tové appartient à l’ethnie éwé, majoritaire dans cette région du Togo, où l’opposition a traditionnellement trouvé une grande partie de sa base électorale.
Une fonction largement symbolique
Son élection à la présidence de la République intervient dans un contexte de profondes mutations institutionnelles. La nouvelle Constitution, adoptée en 2024, a instauré un régime parlementaire dans lequel les pouvoirs exécutifs reviennent au Président du Conseil, désigné par le parti majoritaire à l’Assemblée nationale.
Le président de la république, également chef de l’État, élu pour un mandat de quatre ans renouvelable une fois, incarne l’unité nationale, remet les décorations de la République et accrédite les ambassadeurs, mais n’a plus d’influence directe sur la conduite de la politique nationale ni internationale. Tous ses actes doivent être contresignés par le Président du Conseil et il doit recevoir celui-ci deux fois par an pour un état de la Nation, une fois en présence des chefs traditionnels.
Une nomination symbolique
Pour nombre d’observateurs, le choix de Jean-Lucien Savi de Tové revêt une portée symbolique : celle d’un homme respecté par différents courants politiques et porteur d’un parcours qui a traversé les grandes étapes de la vie politique togolaise. Sa désignation est perçue comme un geste de réconciliation nationale, dans un climat où la réforme constitutionnelle, saluée par le pouvoir comme une modernisation, continue de susciter des critiques au sein de l’opposition.
Avec cette double investiture, le Togo entre officiellement dans la Cinquième République, entérinant une redistribution inédite des rôles au sommet de l’État.
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