En choisissant le haoussa comme langue nationale, le Niger réoriente sa politique linguistique dans un contexte marqué par une rupture avec la France et la remise en cause de l’héritage postcolonial.
Le Niger a officiellement adopté le haoussa comme « langue nationale », reléguant le français au rang de « langue de travail », apprend-on de l’Agence France-Presse (AFP), ce mardi 8 avril. Cette décision, inscrite dans la Charte de la refondation promulguée le 26 mars 2025 par le président Abdourahamane Tiani (photo), marque une rupture symbolique avec l’ancienne Constitution suspendue après le coup d’État de juillet 2023.
L’article 12 de cette nouvelle charte est clair : « la langue nationale est le haoussa » et « les langues de travail sont l’anglais et le français ». Un changement notable avec l’ancienne Constitution qui reconnaissait toutes les langues communautaires du Niger comme langues nationales avec un statut égalitaire.

Cette décision intervient dans un contexte de tensions croissantes avec la France. Les nouvelles autorités nigériennes ont récemment quitté l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF) en mars 2025 et rebaptisé plusieurs rues de Niamey qui portaient des noms français. Cette prise de distance avec la France fait écho à une tendance observée dans les deux autres pays membres de l’Alliance des États du Sahel (AES). En effet, le Mali et le Burkina Faso ont également choisi des langues nationales comme langues officielles à la place du français devenu langue de travail.
Les conséquences concrètes de cette réorientation linguistique restent à déterminer. La mise en place de programmes éducatifs, la traduction des textes administratifs, ou encore l’adaptation des systèmes judiciaires et médiatiques à cette nouvelle réalité linguistique sont autant d’enjeux pratiques qui détermineront si ce changement s’ancrera durablement ou si elle restera, comme certains le craignent, un acte essentiellement symbolique.
Sur les réseaux sociaux, certains Nigériens ont également exprimé des inquiétudes quant à une possible hiérarchisation des langues et un risque d’exacerbation des tensions communautaires dans un pays qui compte une dizaine de langues parlées.
Réagissez à cet article