Goulamina au Mali, Manono en RDC et maintenant Arcadia au Zimbabwe. Cette année, les entreprises chinoises ont sécurisé des millions de tonnes d’approvisionnement en lithium sur plusieurs années grâce au rachat ou à la prise d’intérêts dans des projets phares du continent.
Au Zimbabwe, le projet de lithium Arcadia passe sous pavillon chinois. C’est ce qu’a annoncé jeudi 23 décembre son actuel propriétaire, l’australien Prospect Resources, qui a conclu un accord contraignant avec le chinois Zhejiang Huayou Cobalt, pour lui céder l’actif en échange de 377,8 millions $.
Cette acquisition est le fruit d’un processus lancé en août 2021 et conduit par les sociétés de conseil Azure Capital et Vermilion Partners, afin de trouver des investisseurs capables de financer la construction de la mine. Cela aurait pu se traduire par la formation d’une coentreprise ou la signature d’accords d’approvisionnement en échange des fonds, deux méthodes de financement en vogue pour des métaux stratégiques comme le cobalt ou le lithium. Prospect a finalement opté pour une troisième voie.
« La conclusion de cette évaluation est que la proposition de Huayou offre une proposition ajustée au risque très attrayante pour les actionnaires de Prospect, en particulier lorsqu’elle est considérée par rapport aux risques de calendrier et d’exécution liés au développement et à l’exploitation du projet Arcadia, que ce soit sous la propriété de Prospect ou en coentreprise », explique son DG Sam Hosack.
Mainmise progressive de la Chine sur le lithium africain
Si cette transaction, soumise encore aux approbations réglementaires, notamment celles des autorités chinoises et zimbabwéennes, aboutit, il s’agira du troisième projet majeur de lithium sur le continent dans lequel les entreprises chinoises ont pris des intérêts au cours des derniers mois.
Plus tôt cette année, c’est CATH Energy Technologies qui a conclu un accord avec une autre société australienne, AVZ Minerals, afin d’acquérir 24 % d’intérêts dans Manono, le projet phare de lithium en RDC. Avant cela, une autre compagnie chinoise, Ganfeng Lithium, s’est déjà signalée en juin dans le cadre d’un partenariat avec l’australien Firefinch pour développer la future mine de lithium Goulamina au Mali. La même société avait déjà conclu l’année dernière un accord avec AVZ pour lui acheter du lithium…
Ces projets de « classe mondiale » peuvent soutenir une production de lithium sur 20 ans au moins (à Manono et Goulamina) ou sur plus de 18 ans (à Arcadia). Seul le projet ghanéen Ewoyaa (qui a une durée de vie de 11 ans selon l’étude exploratoire publiée début décembre) a échappé à l’appétit chinois, car entré dans le giron de l’américain Piedmont Lithium.
En dépit des tensions qui affectent les relations commerciales et diplomatiques entre la Chine et l’Australie depuis trois ans, ces divers accords sont le signe que les partenariats fleurissent plutôt entre les sociétés des deux pays. Un pragmatisme qui s’explique du côté chinois par une volonté de sécuriser l’approvisionnement pour le lithium, un métal indispensable aux batteries des véhicules électriques que la Chine produit énormément.
Alors que pays et sociétés étrangères achètent à l’avance ces millions de tonnes de matières premières pour alimenter leurs industries, on peut s’interroger sur la viabilité des projets de création de chaines locales d’approvisionnement pour les batteries et véhicules électriques, portés par plusieurs pays africains, dont la RDC, et basés sur ces métaux stratégiques dont regorge le sous-sol du continent.
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