Lors d’un webinaire réunissant le 22 avril les décideurs africains et européens, Afruibana, l’association des producteurs africains de bananes, a présenté son Livre Blanc sur la Banane Africaine intitulé : « La banane au cœur du développement rural africain – un défi commun pour l’Afrique et l’Europe ».
Le lancement de ce Livre Blanc est notamment marrainée par l’Eurodéputée Marie-Pierre Vedrenne, vice-présidente de la Commission du commerce international et l’Eurodéputée Pierrette Herzerberger-Fofana, vice-présidente de la Commission du développement et parrainé par Carlos Zorrinho, co-président de l’assemblée parlementaire paritaire ACP-UE.
Rendre la banane africaine plus durable et compétitive
Fruit de deux ans de travaux, le Livre Blanc sur la Banane Africaine dresse un état des lieux de la situation au terme d’une décennie de libéralisation du marché européen et passe en revue les axes d’investissements considérés par les producteurs africains comme prioritaires : capital humain et développement des territoires, R&D et modernisation des pratiques culturales, changement du modèle agricole pour une meilleure productivité, transition écologique et énergétique, transformation locale et développement des marchés régionaux.
Afruibana propose ainsi un ensemble de solutions pour mener à bien la transformation de la filière et lui donner les moyens de sa résilience et de sa pérennisation dans la prochaine décennie.
Toutes ces solutions tendent à favoriser l’amélioration du bilan carbone du secteur et s’inscrivent dans une logique « de la ferme à la fourchette » pour une alimentation durable où l’emploi de produits synthétiques cherche à être systématiquement limité dans la mesure du possible.
Un marché européen de la banane sinistré
Bien que le marché européen de la banane soit en croissance ces dernières années, plus de 95% de cette croissance du marché européen a été capturée par les producteurs latino-américains.
Alors qu’en 2013 les bananes Dollar représentaient déjà 69,1 % du marché européen, l’augmentation fulgurante de leurs capacités de production, combinée à la dérégulation du marché européen et un renforcement du pouvoir de négociation des acheteurs de la grande distribution ont conjointement entraîné une croissance massive de leurs parts de marché (PdM) relatives à désormais 75,5 %.
Sur la même période (2013-2020), malgré des efforts considérables de gain de compétitivité, les producteurs africains voyaient leurs PdM passer de 10,1 % à 8,9 %, celles des producteurs caribéens de la zone ACP de 9,5 % à 6,8 % et celles des producteurs européens de 11,3 % à 8,9 %.
Il faut cependant noter que, si les volumes de bananes exportées vers l’Union Européenne sont en augmentation, cette surabondance a entraîné une importante baisse du prix de la banane.
Alors qu’en 2015, le prix moyen à l’importation était de 14,3 euros/carton de banane il s’est établi en 2020 à 11,7 euros, mettant ainsi gravement en péril toutes les origines et même celles d’Amérique Latine.
Post-Cotonou, l’occasion d’un nouveau départ pour l’Afrique et l’Europe
Alors que l’UE et l’Organisation des États d’Afrique, des Caraïbes et du Pacifique (OEACP) ont paraphé l’accord post-Cotonou le 15 avril dernier, les producteurs africains espèrent désormais trouver avec leurs partenaires européens des outils communs pour contribuer au développement agricole africain.
« Lors de l’Appel d’Abidjan en 2019, nous avions tiré la sonnette d’alarme sur les risques d’une libéralisation du marché européen sans régulation, déclare Jean-Marie Kakou Gervais, vice-président d’Afruibana.
Aujourd’hui, nos prédictions se réalisent malheureusement. La surabondance de l’offre de banane Dollar et les politiques d’achat agressives menées par la grande distribution européenne détruisent à grande vitesse des filières indispensables au développement économique des zones rurales africaines ».
« L’intégration des Objectifs de Développement Durable (ODD) au post-Cotonou est une bonne chose, mais doit s’accompagner d’une certaine cohérence politique côté européen, explique Joseph Owona Kono, président d’Afruibana.
Entre les objectifs affichés de la politique de développement de l’UE et les pratiques de la politique commerciale, il doit y avoir une mise en cohérence et une harmonisation, afin de préserver les filières créatrices de richesses et d’emplois sur le continent africain et avant que l’urgence climatique, qui n’a pas été précipitée par notre continent, ne vienne perturber plus encore notre agriculture ».
À propos d’Afruibana :
Afruibana est une association née du regroupement de plusieurs associations de producteurs et exportateurs de fruits de Côte d’Ivoire, du Cameroun et du Ghana. L’association représente et souhaite porter la voix des producteurs de fruits africains auprès des institutions internationales dans le cadre de la négociation des échanges bilatéraux et multilatéraux.
En Côte d’Ivoire, au Cameroun et au Ghana, les filières de la banane emploient près de 30 000 personnes, ce qui représente au total 80 000 emplois directs et indirects. Les trois pays ont produit près de 600 000 tonnes de bananes en 2020.
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