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#Medecine #Sante #Trains #Afrique #AfriqueDuSud
Denys Bédarride
24 janvier 2023 Dernière mise à jour le Mardi 24 Janvier 2023 à 10:22

La célébration de la Journée mondiale de la santé mentale en octobre dernier, a donné l'occasion de réfléchir à l'impact transformateur du train médical Phelophepa de Transnet sur les services de santé mentale en Afrique du Sud. Phelophepa fournit des soins de santé aux communautés rurales d'Afrique du Sud depuis plus de 20 ans.

L’air matinal est frais et piquant, mais déjà des files d’attente se forment tranquillement le long d’un tronçon de voie ferrée dans la petite ville de Darling, une communauté agricole de la région de la côte ouest du Cap occidental, en Afrique du Sud, située à environ 75 kilomètres de la ville du Cap.

Ils viennent de toute la ville et des communautés voisines – une classe d’enfants de l’école primaire, des mères, des adolescents, des agriculteurs des fermes environnantes – un mélange éclectique.

Nthombi Pukwana, psychologue clinicienne et responsable par intérim du train pour la journée et le week-end, a été notre hôte et notre guide le jour de la visite. Sa passion et sa foi dans la mission de Phelophepa sont manifestes.

Ce train de soins de santé dénommé Phelophepa, l’un des deux trains détenus et gérés par Transnet, effectue son avant-dernier arrêt avant la fermeture annuelle des services pour révision et pour permettre au personnel de se reposer et de récupérer. Après plus de 30 semaines d’activité, l’année a été longue. Les trains circulent de janvier à octobre, soit environ 35 à 36 semaines par an, et visitent tous les quinze jours une communauté rurale différente dans les quatre provinces sélectionnées.

Les deux trains comptent 19 voitures entièrement rénovées et équipées, conçues et construites sur mesure par Transnet Engineering, une division opérationnelle de Transnet SOC Ltd. Plus de 40 employés permanents ainsi que de nombreux étudiants en dernière année et des bénévoles de la communauté travaillent sur les trains.

Nthombi Pukwana, ainsi que deux autres psychologues qualifiés et une équipe d’étudiants de dernière année de psychologie, ciblent principalement les interventions préventives auprès des adolescents, en traitant des questions telles que la toxicomanie, la sexualité, l’anxiété, les traumatismes et le deuil. L’orientation professionnelle et le conseil familial sont d’autres domaines d’intervention importants.

« Les adolescents se posent des questions sur le monde qui les entoure. Ils ne peuvent pas parler à leurs parents de l’abus de substances ou de leur curiosité pour les drogues ou le sexe. Nous voulons être les adultes à qui les enfants peuvent se confier sans horreur ni jugement et être un espace sûr pour eux, mais nous apprenons également aux adultes la manière de parler à leurs enfants », a déclaré Nthombi Pukwana.

La promotion de la santé mentale est l’un des principaux objectifs de l’équipe, un sujet négligé par la plupart des gens. Il est essentiel de combattre les stéréotypes qui entourent les maladies mentales et d’informer les populations sur les moyens d’obtenir de l’aide. « La psychologie n’est pas vraiment connue. Les communautés n’ont pas de psychologues », explique Nthombi Pukwana.

Avant l’arrivée du train dans une communauté, des mobilisateurs sociaux sont déployés pour faire passer le message, préparer le terrain et évaluer les besoins. En collaboration avec les communautés locales et les ministères de la Santé, des Services sociaux et d’autres partenaires, le train fait un arrêt de deux semaines dans les districts sélectionnés, au cours duquel il propose ses services.

« Il faut qu’ils sachent que nous existons et qu’ils nous attendent », explique Nthombi Pukwana.

Le système complète et soutient ainsi les structures de santé communautaires existantes et établit des relations avec les prestataires de soins locaux. Ainsi, les patients peuvent être orientés et continuer à recevoir les soins dont ils ont besoin après le départ du train. C’est important pour la prise en charge phycologique, explique-t-elle.

Nthombi Pukwana émet toutefois des réserves : « Phelephepa est une structure de soutien… elle est là pour combler des lacunes. Nous n’essayons pas de réparer quoi que ce soit. Il est essentiel d’apprendre aux parents et aux enseignants à jouer leur rôle et à parler aux jeunes enfants. Nous essayons de créer ces espaces ».

Achona Vuta, 26 ans, est une conseillère accréditée qui a initialement rejoint le train en tant qu’étudiante de dernière année en 2020 pour deux semaines. Elle a trouvé cette expérience tellement mémorable qu’elle ne pouvait que revenir. Cette période a été marquée par de nombreuses premières : sa première séance de thérapie de couple et son premier atelier d’éducation sexuelle. La gestion du chagrin et du deuil est devenue son domaine de prédilection, tout comme la formation des enseignants à la gestion du stress et des conflits, omniprésents dans de nombreuses zones rurales et pas seulement dans les grandes villes de banlieue.

Les thérapeutes affirment que l’expérience de la traversée du pays leur fait prendre conscience de l’universalité des problèmes de santé mentale dans les différentes communautés.

Pour Achona Vuta, la leçon la plus importante tirée de son expérience dans le train est la communauté.

« Ce train est axé sur le travail communautaire ; c’est l’essence même de ce train. C’est un train au service de la population. Il vous expose à la communauté et à la réalité de l’Afrique du Sud », dit-elle.

« J’ai trouvé que la thérapie était un espace sûr, mais aussi un espace amusant », ajoute-t-elle.

Ces trains rendent les soins de santé mentale – et les soins médicaux de qualité – accessibles aux communautés les plus reculées d’Afrique du Sud, où il n’y a souvent qu’un seul médecin pour 5 000 habitants.

Solomon Quaynor, vice-président de la Banque africaine de développement chargé du Secteur privé, de l’Infrastructure et de l’Industrialisation, a exprimé son respect pour les services de santé innovants de Phelophepa, qui sont reconnus dans le monde entier.

« Depuis 2010, la Banque africaine de développement a investi un total de 500 millions de dollars dans Transnet, pour une partie de son programme de dépenses d’investissement, a souligné Solomon Quaynor. Le train de Phelopepa, bien que tangentiel à cela, est un exemple de la façon dont les investissements s’alignent sur nos priorités, les « High 5 » telles que l’amélioration de la qualité de vie des populations en Afrique. »

Le financement de la Banque africaine de développement a été essentiel pour relever les défis opérationnels de Transnet. Il a notamment permis de porter sa capacité de fret de 80 à 176 tonnes grâce à l’acquisition de matériel roulant moderne. Cela a amélioré l’efficacité opérationnelle et contribue à positionner la société comme un acteur régional stratégique.

Nthombi Pukwana affirme qu’après trois ans, elle est loin de vouloir abandonner la course.

« C’est incroyable… si vous cherchez des réponses, vous les trouverez », dit-elle.

Le train Phelophepa en bref :

– Le nom « Phelophepa » vient de la langue sotho et signifie, en termes approximatifs, « bonne et saine santé ».

– Les trains de soins de santé Phelophepa sont les seuls trains de soins de santé primaires au monde. Ils sont reconnus comme l’un des concepts les plus innovants en matière de soins de santé primaires en Afrique du Sud et dans le monde.

– De janvier 1994 à mars 2020, les trains ont eu un impact positif sur la vie d’environ 12,5 millions de personnes, distribué plus d’un demi-million de paires de lunettes et fourni des médicaments à environ 800 000 personnes.

– Chaque année, Phelophepa touche plus de 91 000 patients par le biais de ses cliniques embarquées, 200 000 personnes par le biais de ses programmes de proximité et offre des possibilités de stages d’apprentissage par l’expérience à plus de 1 100 étudiants de dernière année. Cela inclut des étudiants d’institutions internationales d’enseignement supérieur.

– Depuis sa création, 15 000 volontaires communautaires ont participé à un programme d’éducation aux soins de santé de base, tandis que plus de 3 millions de personnes ont participé à des sessions de formation au VIH/Sida et aux premiers secours.

Source : African Development Bank Group (AfDB)

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