Pour la troisième fois après 2022 et 2023, le Campus des Jeunes Entrepreneurs Africains, co-porté par la Fondation Prospective et Innovation ainsi que la Métropole de Montpellier, revenait cet été dans le sud de la France. L’occasion de discuter des perspectives offertes aux jeunes entrepreneurs de part et d’autre de la Méditerranée en matière d’innovation auprès de Gérardine MAHORO, Fondatrice de Act05, cabinet de conseil africain spécialisé dans les questions africaines en France et en Belgique. Interview exclusive.
Ecomnews Afrique. Quels sont les grands défis à relever en matière d’innovation ?
Gérardine MAHORO, Fondatrice de Act05. « Les perspectives d’innovation sont larges. Nous avons évidemment besoin de travailler sur l’environnement opérationnel pour permettre à la fois aux investisseurs de pouvoir être dans un cadre favorable, mais aussi aux entreprises et startups de se structurer et de se formaliser. Il faut créer des instruments afin d’accompagner les entreprises et les projets sans risques, déjà établis, et qui cherchent des investissements. Pour répondre plus rapidement à des appels d’offres qui existent, mais auxquels ils ne peuvent pas prétendre parce qu’il leur manque des ressources financières ou techniques qu’ils ne peuvent pas pourvoir en l’état. Ce sont des instruments directs qui peuvent être créés dès aujourd’hui pour financer ces entreprises et ces projets-là. »
Ecomnews Afrique. De quel profil d’entreprises parle-t-on ?
Gérardine MAHORO. « L’Afrique a cette particularité d’avoir une très grande démographie avec énormément de jeunes et de femmes. Donc nous avons beaucoup de PME, de startups et même de grosses entreprises, mais qui ne correspondent pas aux micro-crédits ni au financement des banques traditionnelles et des institutions internationales. C’est là où sont l’essentiel des entrepreneurs africains et où nous créons de la valeur et de l’emploi pour permettre aux Africains, par leur travail et leur talent, de participer à la croissance et à l’essor économique de leur pays. »
Ecomnews Afrique. Quels sont les freins pour les entrepreneurs souhaitant se développer ?
Gérardine MAHORO. « Beaucoup d’entrepreneurs et de chercheurs africains qui ont le savoir-faire s’inscrivent dans des programmes qui ne mettent pas en valeur leur talent. Ils cherchent du travail et du financement, ils tombent sur un programme de la France ou d’un autre pays qui propose une formation x ou y, où il faut utiliser tels outils, avoir tels partenaires, et ils s’y inscrivent. Pourtant, ce n’est pas forcément le meilleur partenaire pour leur projet, ni la meilleure pratique. Mais ils vont s’inscrire parce que le financement est là. Et ça, je le vois très régulièrement. »
Ecomnews Afrique. Le mot de la fin ?
Gérardine MAHORO. « Un investisseur, un entrepreneur, ou un étudiant, quelle que soit la démarche qu’il entreprend en allant vers l’Asie, l’Amérique du Sud, ou la Chine, il se prépare. Il arrive là-bas, il essaye de comprendre comment fonctionne le système et il se forme. Qui fait quoi ? Comment on le fait ? Comment on communique ? Eh bien, on ne le fait pas quand on va en Afrique ! Du coup, la personne qui arrive s’attend à avoir des collaborateurs qui réagissent comme dans son pays, avec le même état d’esprit, le même savoir-faire et le même système. Il commence à faire son business, à collaborer, à mettre des projets en place. Et à la première difficulté, il va dire que l’Afrique c’est risqué. Mais ça ne l’est pas plus qu’ailleurs. Les risques existent mais ils sont particuliers à la réalité locale, comme partout ailleurs. Donc lorsqu’on vient en Afrique, il faut avoir l’état d’esprit de s’adapter, de prendre le temps de comprendre comment ça marche, tout comme on le fait quand on va en Asie, aux Etats-Unis, au Japon ou même quand on vient ici ! »
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