En Afrique, la capacité à orienter efficacement les ressources financières disponibles vers les bons projets est le véritable obstacle au financement des infrastructures, indique Africa Finance Corporation.
Selon le rapport 2025 sur l’état des infrastructures en Afrique (SAI 2025), publié le 5 juin 2025 par Africa Finance Corporation (AFC), l’Afrique dispose de plus de 4000 milliards $ de capitaux nationaux investissables. Ces fonds sont principalement constitués d’actifs détenus par des institutions financières africaines : fonds de pension, compagnies d’assurances, fonds souverains, banques de développement, banques commerciales et réserves de devises.
Pourtant, une part importante de ces ressources est investie dans des placements à court terme et à faible rendement, souvent en dehors du continent. L’AFC souligne que le vrai problème ne réside pas dans la disponibilité des capitaux pour financer les infrastructures en Afrique, mais dans les mécanismes permettant de les canaliser vers les bons projets.
Sur les 4000 milliards $ identifiés, environ 1600 milliards $ sont localisés dans le secteur non bancaire. Les fonds de pension et retraite représentent plus de 455 milliards $, les compagnies d’assurance environ 320 milliards $, les banques publiques de développement 250 milliards, les fonds souverains 150 milliards. Les réserves de change des pays africains atteignent quant à elles 473 milliards $.
Le secteur bancaire africain dispose d’environ 2500 milliards $ d’actifs, en grande partie sous-exploités et qui peuvent être mobilisés pour financer des projets d’infrastructures et industriels de grande envergure, essentiels à la transformation structurelle de l’Afrique. Mais, ce secteur est souvent fragmenté. Son renforcement, à travers des réformes, permettrait d’orienter plus de capitaux vers des projets structurants.
Le potentiel sous-utilisé des investisseurs institutionnels
Les investisseurs institutionnels africains, comme les fonds de pension et les compagnies d’assurance, gèrent ensemble près de 777 milliards $ d’actifs. Ce sont des sources de financement dites patientes, idéales pour soutenir des projets de longue durée comme les infrastructures routières, énergétiques ou numériques. Cependant, une faible part de ces ressources est investie dans l’économie réelle, en raison de réglementations restrictives, du manque d’instruments financiers adaptés ou encore d’une perception de risque élevée.
De leur côté, les banques publiques de développement et les fonds souverains, qui gèrent environ 400 milliards $, sont souvent sous-utilisées à cause de mandats fragmentés et d’un faible alignement avec les plans de développement nationaux. Les transferts de fonds des diasporas africaines, qui ont dépassé 95 milliards $ en 2024, représentent aussi une source de capitaux d’investissement sous-exploitée pour le financement du développement.
Nécessité de réformes
Pour mobiliser ces capitaux, l’AFC appelle à la mise en place d’institutions financières plus solides et à la création de marchés de capitaux régionaux plus intégrés. Il est aussi nécessaire de diversifier les véhicules d’investissement capables de collecter et de canaliser l’épargne à long terme vers des projets d’infrastructures.
Des initiatives comme l’Association des bourses africaines (ASEA) et le projet de liaison des bourses africaines (AELP) peuvent favoriser la cotation transfrontalière et améliorer la liquidité des marchés financiers du continent. Enfin, l’inclusion financière, peut contribuer à intégrer les acteurs informels (qui représentent 80% de l’emploi et 40% du PIB, dans plusieurs économies africaines), à l’économie formelle et accroître le vivier de capitaux investissables.
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