Le marché du carbone est un mécanisme qui permet d’échanger des droits d’émission de CO2 de la même manière que des titres financiers. Les pays aux entreprises les moins pollueuses peuvent donc vendre leurs droits d’émission aux entités les plus pollueuses.
Le gouvernement camerounais pourrait instaurer pour la première fois la taxe carbone, comme lui en donne la latitude la circulaire relative à la préparation de la Loi de finances 2024, signée le 30 août 2022 par le président Paul Biya, qui y prescrit « la poursuite du renforcement de la fiscalité environnementale, en droite ligne des engagements internationaux souscrits par le Cameroun ».
À cet égard, « le champ d’application de la taxe spéciale sur les produits pétroliers (TSPP) sur certains combustibles tels le gaz naturel liquéfié pourrait être revu, de même que l’institution d’une taxe carbone pourrait être envisagée » relaie Investir au Cameroun.
Taxe environnementale assise sur les quantités de CO2 émises, la taxe carbone est payée par les entreprises dont les activités polluent le plus l’environnement. Au Cameroun, le think tank sud-africain ISS Africa classe les sociétés produisant les hydrocarbures et le ciment dans cette catégorie. Dans son rapport sur les perspectives économiques sur l’Afrique publié en septembre 2022, il projette d’ailleurs que le Cameroun quadruplera ses émissions de carbone à 15,1 millions de tonnes d’ici 2043, du fait des producteurs de ciment et d’hydrocarbures.
« Les émissions de carbone sont passées de 0,5 million de tonnes de carbone en 1991, à environ 3,1 millions t en 2019, soit une augmentation de 520% au cours des 29 dernières années. Sur la trajectoire actuelle, les émissions devraient encore augmenter, de sorte que d’ici 2043, la quantité totale de carbone émise par le Cameroun aura plus que quadruplé ». Sur cette base, l’instauration de la taxe carbone au Cameroun devrait contribuer à booster les revenus fiscaux de l’État.
La réforme pourrait également pousser les pollueurs à réduire leurs émissions de carbone dans l’atmosphère pour ne pas avoir à payer davantage de taxes, permettant ainsi au pays de respecter ses engagements internationaux en la matière. En effet, les prévisions d’ISS Africa, qui projette une augmentation fulgurante des émissions de gaz à effet de serre à l’horizon 2043, contredisent les engagements internationaux du pays dont l’objectif est plutôt de réduire les émissions de carbone de 32% d’ici 2035. Cette ambition avait été proclamée lors de la COP21 à Paris.
Enfin, cela devrait aussi mieux positionner le Cameroun sur le marché international du carbone, Paul Biya ayant également prescrit dans sa circulaire l’exploration d’opportunités pour permettre au pays de capter des financements dits verts. Le ministre des Finances, Louis Paul Motazé, avait présidé le 25 octobre 2022 un atelier de sensibilisation des acteurs de l’administration sur le marché du carbone, afin d’en faire une source de financements plus importante du budget de l’État.
« Il s’agit de faire l’état des lieux, d’interroger la situation à date et de proposer des palliatifs ou des thérapies pour endiguer les carences et autres manquements constatés dans le processus d’adhésion de notre pays au marché du carbone » avait-il expliqué.
Il faudra néanmoins satisfaire certains préalables pour que le Cameroun fasse valoir ses prétentions sur le marché du carbone. Le plus urgent est la réalisation du bilan carbone du pays, qui permettra de connaitre la quantité de carbone stockée par le pays suite à ses différentes actions de lutte contre les changements climatiques. Pour l’heure, ce bilan carbone qui conditionne l’accès aux financements verts, n’est disponible que pour 2 des 5 zones agroécologiques du pays.
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