Seule centrale nucléaire active en Afrique à ce jour, Koeberg contribue à hauteur de 5 % au mix énergétique sud-africain. Alors qu’elle devrait encore fonctionner au cours des 20 prochaines années, le pays prévoit de porter la capacité nucléaire nationale à 21 000 MW, d’ici 2050.
En 1984, l’Afrique du Sud inaugurait Koeberg-1, premier réacteur de la centrale nucléaire de Koeberg, devenant ainsi le premier pays africain et encore le seul à ce jour à disposer d’une centrale nucléaire fonctionnelle. Le site est situé à Duynefontein, à 27 km au nord du Cap, et abrite un second réacteur nucléaire (Koeberg-2) qui est quant à lui entré en exploitation commerciale en 1985. Les deux installations offrent une capacité combinée de 1860 MW à la centrale.
Sur les traces de la centrale de Koeberg
L’histoire du nucléaire en Afrique du Sud remonte aux années 1950, lorsque le gouvernement de l’Apartheid commence à s’intéresser à cette technologie. Ce qui n’était alors qu’un sujet de débat aboutit rapidement à un projet énergétique national, marqué par l’adhésion du pays à l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) en 1957. Deux ans plus tard, le gouvernement approuve un plan de développement d’une industrie nucléaire. Ce programme prend forme avec la construction du site de Pelindaba en 1961, un projet mené en partenariat avec Atoms for Peace, l’initiative américaine promouvant l’usage civil du nucléaire.
Pelindaba devient ensuite le centre névralgique du nucléaire sud-africain, accueillant en 1965 le Safari-1, premier réacteur nucléaire de recherche du pays (20 MW). C’est dans cette dynamique que naît l’idée de construire une centrale nucléaire de production électrique. L’objectif était avant tout de réduire la dépendance au charbon pour alimenter la région du Cap, où l’acheminement du combustible représentait un défi logistique et financier.
Dans les années 1970, un accord de coopération nucléaire est signé avec la France, confiant la construction de Koeberg à un consortium composé de Spie Batignolles, Alsthom (devenu Alstom) et Framatome. Les travaux débutent en 1976 et s’achèvent neuf ans après, avec l’entrée en service des deux réacteurs à eau pressurisée (REP).
Selon les données de l’AIE et de la Banque mondiale (2021), Koeberg produit 12,4 TWh par an, couvrant environ 5 % des besoins électriques du pays. Initialement conçue pour une exploitation de 40 ans, la centrale devait fermer en 2024-2025. Cependant, Eskom, la compagnie publique d’électricité, a entrepris des démarches pour prolonger sa durée de vie de 20 ans supplémentaires.
Le projet d’extension à long terme (LTO)
La centrale nucléaire de Koeberg verra finalement son exploitation prolongée jusqu’en 2045-2047. Pour obtenir cette extension, Eskom a soumis un dossier de sûreté au National Nuclear Regulator (NNR) et sollicité l’AIEA pour une évaluation des conditions de sécurité. Une mission en 2022 avait identifié plusieurs problèmes, mais une nouvelle visite en 2024 a confirmé des avancées significatives, permettant d’obtenir le feu vert du régulateur.
Le 15 juillet 2024, le NNR a officiellement prolongé la licence d’exploitation de Koeberg-1 jusqu’en 2044. La décision pour Koeberg-2 est attendue d’ici novembre 2025, date d’expiration de sa licence actuelle. En attendant, ce dernier réacteur continue de fonctionner, alors que Koeberg-1 devrait entrer dans une nouvelle phase de maintenance en janvier 2025, conformément à une annonce d’Eskom.
Au-delà de la prolongation de Koeberg, l’Afrique du Sud ambitionne de développer davantage l’énergie nucléaire pour sécuriser son approvisionnement électrique et réduire sa dépendance aux énergies fossiles.
Une capacité nucléaire installée de 21 000 MW d’ici 2050
Dans son Plan intégré des ressources (IRP) de 2023, le ministère des Ressources minérales et de l’Énergie a fixé un objectif ambitieux : atteindre 21 000 MW d’énergie nucléaire d’ici 2050. Pour y parvenir, le pays prévoit une montée en puissance progressive, avec 2 500 MW supplémentaires, puis 4 000 MW d’ici 2040, et 14 500 MW en 2050.
Selon Reuters, cette décision a fait suite à plusieurs procédures judiciaires intentées par l’Alliance démocratique (DA) et deux organisations environnementales : le Southern African Faith Communities Environnement Institute (SAFCEI) et Earthlife Africa Johannesburg. Dans un communiqué de presse publié en mars 2024, les deux entités avaient annoncé leur projet de « soumettre le projet à un contrôle judiciaire », car étant, selon elles, « vicié et procéduralement inéquitable ».
Ce n’est pas la première fois qu’un projet de construction de centrales nucléaires divise l’opinion publique en Afrique du Sud. En effet, plusieurs programmes de ce genre ont été proposés par les gouvernants depuis le début des années 2000 sans véritables suites, malgré des accords de coopération signés avec des pays comme la Russie, la France, la Corée du Sud ou encore la Chine.
Le projet visant à ajouter 9,6 GW au parc nucléaire sud-africain formulé dans l’IRP de 2010 reste toutefois le cas le plus connu. Lancé en 2015 sous la présidence de Jacob Zuma et ayant vu la candidature de plusieurs sociétés comme Rosatom, KEPCO, Areva ou Westinghouse, il a finalement été abandonné en 2018, après plusieurs accusations de mauvaise gouvernance et de corruption proférées contre le gouvernement.
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