Petit pays hispanophone d’Afrique centrale de 1,4 million d’habitants, la Guinée équatoriale a connu une forte croissance économique. Une croissance à laquelle la France a pris part dès l’ouverture du pays sur l'extérieur par le président Obiang, il y a 40 ans. Quels sont aujourd’hui les axes de coopération entre Paris et Malabo ? Quelle incidence la Chine a-t-elle sur ces relations ? Entretien avec Olivier Brochenin, Ambassadeur de France en Guinée équatoriale.
Tout a commencé, ou presque, il y a plus de quarante ans. En 1979, le président Obiang, fraîchement arrivé au pouvoir, décide d’ouvrir son pays après dix années de dictature. La Guinée équatoriale est alors le seul pays non francophone dans une zone largement francophone avec le Cameroun au nord et le Gabon au sud et à l’est.
« Le président Giscard d’Estaing (1974-1981) et le président Mitterrand (1981-1995) ont tendu la main au président Obiang, explique Olivier Brochenin. Ils lui ont proposé d’aider le pays à s’intégrer dans l’environnement économique régional : zone franc, CEMAC, etc. Nos relations sont toujours fondées sur ces choix historiques et stratégiques. »
Conclusion du premier accord de principe entre CAFI et les Ministères des Finances et de l’Agriculture
Depuis, la Guinée équatoriale a connu une croissance économique « phénoménale ». Il y a huit ans, le PIB par habitant a atteint 16.000 à 17.000 euros, avant un retournement de tendance. Mais la Guinée équatoriale est tout de même passée d’un statut de pays parmi les plus pauvres et déshérités d’Afrique, à l’un des plus riches en termes économique et financier.
« Nous avons adapté notre coopération, complète l’Ambassadeur. Nous n’allons plus faire de l’aide au développement ou de l’assistance, nous sommes entrés dans une phase plutôt de coopération économique. »
Appui de la cellule de crise du ministère de l’Europe et des affaires étrangères, avec les coopérants et les sapeurs français, à la suite des explosions de Bata (mars 2021).
Des entreprises françaises bien implantées
Énergie, tourisme, banque, transports… Dans nombre de secteurs, quelques-unes des plus emblématiques et ambitieuses enseignes tricolores ont généré des retombées économiques flagrantes tant sur la partie continentale depuis Bata – plus grande ville de la côte Atlantique – jusqu’à Ebebiyin dans l’extrême nord-est, que sur l’île de Bioko et la capitale Malabo.
« Total tient de facto 70 à 80% du marché de la distribution, énumère le diplomate. Bouygues, Razel-Bec, Sogea sont des entreprises qui ont construit les infrastructures de Guinée équatoriale. » Dans un tout autre domaine, le groupe Castel s’est installé à Bata, « non pas comme importateur de bière, mais comme producteur local ».
Visite de l’Ambassadeur de France, Olivier Brochenin, à la Brasserie Castel Soeguibe à Bata
Le tourisme n’est pas en reste, avec la présence de groupes comme Accor, Sofitel, ou encore Idis. La Société Générale, banque française de renommée internationale, est, elle aussi, présente en Guinée équatoriale depuis de nombreuses années, tout comme Air France, « compagnie envers laquelle les Equato-Guinéens sont reconnaissants ».
« Je crois que c’est une image de marque des entreprises françaises en Guinée équatoriale, estime Olivier Brochenin. Elles étaient là dès l’indépendance, pendant les périodes de vache maigre, comme celles de vache grasse ; elles sont toujours là aujourd’hui et elles sont fiables. »
Une présence contrastée de la Chine et de la Russie
Selon l’Ambassadeur de France en Guinée équatoriale, « les Chinois occupent une part de marché sur les produits de consommation intermédiaires certainement plus importante que la France. » Toutefois, en termes de relations commerciales et d’échanges de produits, la présence de la Chine reste anecdotique.
« J’aimerais aussi qu’il y ait une capacité plus importante d’offre de produits français, déplore l’Ambassadeur, mais pour les entreprises françaises, c’est la présence directe dans les services – banque, hôtellerie, tourisme, transports, construction – qui justifie la relation. »
Présence de l’Ambassadeur de France, aux côtés des coopérants et démineurs français venus à BATA secourir la population à la suite de l’explosion du dépôt de munitions en mars 2021
Les Russes ont, eux, été présents en Guinée équatoriale dès l’indépendance. Mais l’Union Soviétique a vite « réduit la voilure en Afrique ». La Russie a même fini par fermer son ambassade il y a quelques temps. Quant aux entreprises russes, elles ne sont pas présentes directement ici.
« Mais dans d’autres domaines, on sent que les Russes développent une certaine compétence », analyse Olivier Brochenin. Ils essaient d’être présents, mais pas directement dans le champ économique. »
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