Avec la Russie comme premier exportateur, les achats de blé coûtent annuellement 150 milliards FCFA à l’Etat du Cameroun. Comment réduire ses importations ?
Le directeur général de l’Institut de recherche agricole pour le développement (Irad), Noé Woin, vient de terminer une tournée de terrain dans la région de l’Adamaoua, dans la partie septentrionale du Cameroun. L’Irad y a mis en place des champs semenciers pour préparer la relance de la production du blé dans le pays.
Ces trois champs semenciers, qui s’étendent sur une superficie totale d’environ 50 hectares, sont situés dans les localités de Wakwa, Mbang-Mboum et Wassande, apprend-on. Ce dernier site abrite les reliques de la Société de développement du blé (Sodéblé), entreprise publique tombée en faillite en 1980, contraignant le Cameroun aux importations massives de blé, afin d’assurer la production locale de la farine.
« […] Nous pouvons indiquer que le mois de juillet est indiqué pour les semis de blé. Mais, comme il s’agit encore de la recherche, ce constat doit se répéter quatre à cinq fois avant la confirmation et la mise à disposition des semences aux producteurs. L’idéal voudrait que la maturité des graines coïncide avec la fraîcheur du climat, qui s’étend d’octobre à février dans l’Adamaoua », a expliqué Oumarou Palou à Cameroon Tribune, le quotidien à capitaux publics.
Le chef du centre de recherche de l’Irad de Wakwa commentait alors, devant son directeur général, l’évolution en plants des semences de blé mises en terre fin juillet 2022.
Au cours des prochains mois, les semences sorties des champs de l’Adamaoua devraient être multipliées, puis distribuées aux producteurs, afin de relancer la culture du blé dans le pays. Et ainsi réduire des importations en provenance notamment de la Russie.
En effet, ce pays européen est le premier fournisseur de blé au Cameroun. Selon les données de l’Institut national de la statistique, cette céréale représente à elle seule 65% des exportations russes vers le Cameroun.
Une subvention de 10 milliards FCFA
Par exemple, une étude du Bureau de mise à niveau des entreprises (BMN) chiffre à 860 000 tonnes les cargaisons de blé importées par le pays en 2020. « La Russie est le premier exportateur […] avec près de 300 000 tonnes, suivie par le Canada (144 000 tonnes), la France (117 000 tonnes) et les USA (54 000 tonnes) », énumère l’étude du BMN.
Afin de réduire cette dépendance aux importations qui creuse le déficit de la balance commerciale et induit l’expatriation d’environ 150 milliards FCFA chaque année, le gouvernement camerounais, à travers l’Irad, expérimente depuis quelques années des variétés de blé pouvant pousser dans le pays, avec des rendements probants, indique Investir au Cameroun. Ces expérimentations ont eu lieu dans les régions du Nord-Ouest et de l’Adamaoua. C’est dans cette dernière région que l’Irad a décidé de lancer les premiers champs semenciers. Certainement à la faveur des financements récemment mis à disposition par l’Etat.
En effet, après la publication en avril 2022 d’une note de conjoncture sur le blé, dans laquelle l’Irad invoquait le manque de moyens financiers pour le développement de la culture de cette céréale au Cameroun, le chef de l’Etat, Paul Biya, a instruit la mise à disposition d’une subvention spéciale d’un peu plus de 10 milliards FCFA.
« J’ai l’honneur de vous répercuter les très hautes instructions de monsieur le président de la République prescrivant d’octroyer, sur une période de 5 ans à l’Institut de recherche agricole pour le développement, une subvention d’un montant global de dix milliards trois cent millions (10 300 000 000), dédiée au développement de la production et de la transformation du blé au Cameroun », peut-on lire dans une lettre envoyée le 5 juillet 2022 au ministre des Finances, Louis Paul Motazé, par le secrétaire général de la présidence de la République, Ferdinand Ngoh Ngoh.
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