Les Nations unies considèrent Internet comme un service essentiel de première nécessité, au même titre que l’électricité et l’eau potable. Alors que la transformation numérique est au cœur des stratégies de développement en Afrique, garantir son accès à tous est devenu indispensable.
La réduction du déficit d’utilisation de l’Internet mobile pourrait générer 3500 milliards de dollars supplémentaires pour le produit intérieur brut (PIB) mondial entre 2023 et 2030.
En Afrique subsaharienne, le gain potentiel s’élève à 795 milliards de dollars, selon le rapport « The State of Mobile Internet Connectivity 2024 » de l’Association mondiale des opérateurs téléphonie mobile (GSMA).
La région est ainsi la troisième au monde avec la plus forte estimation de revenu additionnel, après l’Asie du Sud et l’Asie de l’Est et du Pacifique.
Ce potentiel financier met en lumière l’impératif économique de connecter les populations jusqu’à présent non connectées dans cette partie du monde, qui affiche le plus grand écart d’utilisation de l’Internet mobile (la proportion de la population vivant dans une zone couverte par un réseau mobile haut débit, mais qui ne l’utilise pas).
Actuellement, l’Afrique subsaharienne dispose d’un taux de couverture mobile relativement élevé. Bien qu’il soit inférieur à celui des autres régions du monde, il atteint tout de même 87 %.
Cependant, cette couverture n’est exploitée que par 27 % de la population de la région, laissant un écart d’utilisation de 60 %.
Autrement dit, 6 personnes sur 10 pourraient utiliser l’Internet mobile, mais ne le font pas. Plusieurs obstacles expliquent cette situation, nécessitant une attention accrue des acteurs du secteur.
Le coût du mobile
Selon la GSMA, « l’accessibilité financière d’un appareil d’entrée de gamme connecté à Internet est relativement maintenue, tandis que celle de l’Internet continue de s’améliorer dans les pays à revenus faibles et intermédiaires (PRFI) de la plupart des régions. Cependant, l’accès aux appareils et à l’Internet continue d’affecter de manière disproportionnée les populations défavorisées. Dans les PRFI, le coût d’un appareil d’entrée de gamme représente en moyenne 18 % du revenu mensuel moyen. Toutefois, pour les 40 % des plus pauvres, ce coût s’élève à 39 % du revenu mensuel, et même à 51 % pour les 20 % les plus pauvres ».
En Afrique subsaharienne, qui regroupe un quart de la population non connectée mondiale, un appareil d’entrée de gamme coûte 99 % du revenu mensuel moyen pour les 20 % des plus pauvres.
Cette inaccessibilité financière des appareils est donc l’une des principales raisons de l’écart d’usage de l’Internet mobile.
Pour pallier cette difficulté, l’Association estime qu’un appareil à 20 $ pourrait devenir abordable pour environ 2 milliards de personnes actuellement non connectées.
Dans ce sens, des initiatives existent déjà : des entreprises comme Orange, avec le modèle Sanza, et Kaios proposent des téléphones intelligents à bas coût pour surmonter le problème d’accessibilité.
Par ailleurs, le paiement échelonné des téléphones est une approche expérimentée par certains opérateurs télécoms, permettant aux consommateurs de choisir leurs mobiles sans se limiter aux modèles par défaut.
Le prix d’Internet
Bien que l’accessibilité financière des forfaits de 1 et 5 gigaoctets (Go) soit améliorée, le coût de l’Internet mobile reste un obstacle majeur, en particulier pour les populations défavorisées, notamment les plus pauvres et les femmes.
En 2023, seules l’Europe et l’Asie centrale, ainsi que l’Asie du Sud, comptaient une majorité de pays où le prix de 1 Go représentait moins de 2 % du revenu mensuel des 40 % les plus pauvres.
Pour les forfaits de 5 Go, seules l’Europe et l’Asie centrale répondent à cet objectif d’accessibilité. En Afrique subsaharienne, la médiane du coût pour 1 Go atteint 15 % du revenu moyen pour l’ensemble de la population et 34 % pour les 40 % les plus pauvres, selon la GSMA.
L’Union internationale des télécommunications (UIT) a fixé deux objectifs : réduire le coût d’un abonnement haut débit d’entrée de gamme à moins de 2 % du revenu mensuel moyen et à moins de 2 % du revenu moyen des 40 % les plus pauvres.
En Afrique subsaharienne, plus de la moitié des pays n’atteignent pas encore cet objectif d’accessibilité.
Ainsi, l’amélioration de l’accès aux appareils mobiles et à l’Internet pourrait réduire significativement l’écart d’utilisation, générant un impact économique évalué à 625 milliards de dollars.
La question du genre
L’écart d’usage entre les sexes constitue également un défi majeur. En Afrique subsaharienne, les femmes sont 32 % moins susceptibles d’utiliser l’Internet mobile que les hommes, bien qu’une légère amélioration ait été constatée par rapport à l’année précédente (36 %).
Ce fossé demeure proche du niveau de 2017 (34 %). L’Afrique subsaharienne et l’Asie du Sud affichent les plus forts écarts entre les sexes en matière d’accès à l’Internet mobile.
Dans les PRFI, 60 % des femmes non connectées vivent dans ces régions.
Le coût d’un appareil d’entrée de gamme représente en moyenne 24 % du revenu mensuel des femmes, contre 12 % pour les hommes.
Les différences de revenus et d’emploi, ainsi que les normes sociales et les pressions familiales, freinent davantage l’accès des femmes à l’Internet mobile.
Réduire cet écart dans les PRFI pourrait générer 1300 milliards de dollars supplémentaires pour le PIB mondial sur la période 2023-2030.
En Afrique subsaharienne, la contribution financière est estimée à 170 milliards $.
L’Internet mobile constitue un levier crucial de croissance économique, en particulier dans les pays à revenus faibles ou intermédiaires, où il est souvent le principal, voire l’unique, moyen d’accès à Internet.
Des études montrent qu’une augmentation de 10 % de la pénétration du haut débit mobile peut entraîner une croissance de 1,0 à 2,5 % du PIB.
En effet, cette technologie améliore la productivité des entreprises et des travailleurs, réduit les coûts de recherche d’information et stimule les échanges.
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